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Interview Semih Sayginer par Steve Andersen

10/07/2013

Publié par jérémie picart

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© © Kozoom
Un homme nouveau pour un nouveau départ : Semih Sayginer est "de retour aux affaires".

Le Magicien Semih Sayginer sera présent à New-York à l’occasion du Verhoeven Open Tournament du 17 au 21 juillet dans la célèbre salle du Carom Café.

Après quelques apparitions couronnées de succès en Corée du Sud en 2008 et en Colombie en 2012, le Turc au jeu si imprévisible et créatif suscite énormément d’attentes dans le monde du billard et devrait être l’attraction du tournoi retransmis par Kozoom pour ses abonnés Premium.

Après son titre de champion du monde décroché en 2003 à Valladolid (ES) à 1,868 de moyenne générale, Sayginer est entré en conflit avec sa Fédération en 2005 et plus particulièrement avec son Président. Depuis 2007, il est absent des compétitions officielles internationales.

Steve Andersen, de la Fédération américaine de billard USBA, s’est entretenu avec le Magicien turc durant une vingtaine de minutes il y a quelques jours à l’occasion de sa venue au Carom Cafe, voici une retranscription de cet échange entre les deux hommes :

 

Steve Andersen : "Bonjour Semih Sayginer, je pense que vous êtes à Istanbul en ce moment, est-ce bien cela ?"

Semih Sayginer : "Bonjour Steve, oui je suis à Istanbul en ce moment."

 

Steve : "D’accord, je suis ravi de m’entretenir avec vous, merci de nous accorder un peu de votre temps. Vous êtes attendu prochainement au Carom Café de New-York et je voudrais vous poser quelques questions pour nos auditeurs américains."

Semih : "OK. Je suis ravi de revenir à New-York après 5 années d’absence."

 

Steve : "Nous le sommes aussi car vous nous avez manqué vous savez. La plupart des gens pensent que vous ne jouez plus, qu’en est-il exactement ?"

Semih : "Bien sûr, je joue et je m’entraine notamment sur mes points faibles et je peux dire que je suis meilleur aujourd’hui. Je fais quelques exhibitions par ci par là depuis que je suis entré en conflit avec ma fédération en 2007 mais ça ne signifie pas que j’ai complètement arrêté le billard. J’ai participé à quelques tournois sur invitation notamment aux Etats-Unis et en Corée du Sud. En 2008, j’ai gagné un tournoi en Corée et en 2012, un tournoi à Bogota en Colombie. Je joue toujours, j’aime jouer, j’aime le jeu et vous me manquez donc je suis réellement impatient de vous retrouver juste pour le plaisir d’être avec vous et pour essayer de donner le meilleur de moi-même. Et surtout de prendre du plaisir, gagner ou perdre n’est pas le plus important. Je sais que je peux gagner en quelque sorte mais ce qui m’importe c’est de prendre du plaisir avec vous.

Aux problèmes avec ma fédération se sont rajoutés des problèmes d’ordre personnel mais j’ai fait table rase de tout ça et je veux aborder la compétition de façon différente. J'ai décidé d’apprécier le jeu et d’aimer le jeu."

 

Steve : "Les mots que vous employez sont importants car on est parfois pollué par les querelles politiques et on en oublie à quel point l’amour du jeu est primordial et sa beauté également. Je vous rejoins à 100% dans votre analyse. On a hâte de vous revoir à New-York. Depuis quand déjà ?"

Semih : "Je serai à NY le 12 juillet. J’ai prévu d’arriver un peu avant pour m’entrainer tout d’abord et aussi pour assister au tournoi féminin. Ca me permettra également de m’accoutumer au décalage horaire afin d’être fin prêt pour le tournoi car je veux bien jouer évidemment."

 

Steve : "Ma question n’était pas claire, quelle est votre dernière apparition au Carom Café ?"

Semih : "Oh ! C’était en 2008."

 

Steve : "D’accord. Quand avez-vous commencé le billard et quel âge aviez-vous ?"

Semih : "J’avais 16 ans et j’ai commencé par la partie Libre car le 3 Bandes était inexistant à l’époque. Tout le monde jouait à la Libre, ce n’était même pas reconnu en tant que sport, c’était juste un jeu de café. J’ai adoré ce jeu et j’ai remporté le championnat d’Istanbul en 1981 après un an de pratique. J’ai conservé les articles de presse de cette époque. Je ne savais pas ce que j’allais faire mais je voulais simplement devenir meilleur."

 

Steve : "Quels sont vos points forts, Semih ?"

Semih : "Lorsque je jouais au plus haut niveau, j’étais capable de réaliser des points inattendus et les gens pensaient que j’étais là pour régaler l’assistance. En réalité, j’essaye de faire le point le plus simplement possible. La façon dont je m’entraine est différente de celle des autres grands joueurs. J’arrive à contrôler certains coups que les autres ne tentent même pas. Ca me rend singulier mais je ne cherche pas à l’être, c’est juste ma particularité. Je veux contrôler les coups, améliorer mes points faibles. On appelle cela parfois un « shot maker » aux Etats-Unis mais j’aime aussi d’autres aspects comme la stratégie du jeu, savoir évaluer les positions laissées à l’adversaire … il y a tellement de paramètres à considérer. Je suis un joueur stratégique et c’est pour cette raison qu’il était difficile de me battre."

 

Steve : "Tout à fait, j’ai vu quelques unes de vos vidéos et des coups auxquels je n’aurais jamais pensé. C’est vraiment extraordinaire. Quels sont vos points faibles ou plutôt y a-t-il des compartiments de jeu que vous aimeriez améliorer ?"

Semih : "Avant, j’étais plutôt quelqu’un d’impétueux, j’avais des difficultés à contrôler mes nerfs et ensuite je me suis calmé peu à peu à partir de 2003, 2004 qui restent mes meilleures années. Ensuite vinrent les problèmes avec ma fédération en 2005 et tout a changé. J’ai tenté d’expliquer cela à mes amis mais j’ai compris plus tard que c’était trop demander que de comprendre la situation dans laquelle je me trouvais. Ce contrôle de mes émotions me rendait parfois malade et je manquais alors d’énergie positive. C’était mon point faible, j’avais des hauts et des bas mais ces derniers temps, je prends plus de plaisir qu’avant. J’ai appris à vider mon esprit de toutes ces pensées parasites et je profite de chaque instant car je sais bien à quel point j’adore ce jeu. Je suis un nouveau Semih, j’adore le jeu, je m’entraine chaque jour. Aujourd’hui samedi, je suis avec ma petite amie, elle ira faire du shopping pendant que je m’entrainerai quelques heures tout seul. J’avais le défaut de focaliser mon esprit sur des problèmes extérieurs et de leur accorder beaucoup trop d’importance. Ces conflits me minaient l’existence et j’ai réalisé que le plus important était l’amour du jeu. Je n’attends pas que le billard me fasse vivre. Bien sûr, j’aime bien gagner ma vie, j’aimerais gagner plus d’argent avec le billard mais je gagne bien ma vie par ailleurs, j’ai choisi ce chemin."

 

Steve : "Il me semble que vous adoptez une attitude saine comme un nouveau départ … vous préparez-vous physiquement pour le carambole ?"

Semih : "Bon, quand j’arriverai au Carom Café, vous vous rendrez compte que je suis bien préparé physiquement car le sport fait partie intégrante de ma vie quotidienne. Je m’entraine, je fais du sport, je suis en excellente forme et à 49 ans, je peux jouer 10 matchs dans la journée sans aucun problème."

 

Steve : "Ca tombe bien car vous savez que le Verhoeven Open se joue dans ces conditions. Que conseilleriez-vous aux joueurs américains pour progresser ? Si l’on remonte au début du siècle dernier, les Etats-Unis dominaient le billard carambole et c’est maintenant l’Europe qui a pris le dessus."

Semih : "J’ai remarqué, au long de ces dernières années, que les joueurs américains se limitaient eux-mêmes dans leur façon de jouer. Ils s’entrainent uniquement dans le but de faire beaucoup de points. Alors il y  en a quand même qui jouent la défense ou l’attaque mais ils ne cherchent pas à contrôler les billes. Leur méthode peut les amener à jouer à 1,500 mais pour aller au-delà, ils devront chercher davantage, ils en ont le potentiel et ils pourraient devenir une nation prépondérante. Il leur faut prendre en compte d’autres aspects du jeu."

 

Steve : "Oui, peut-être qu’il y a de nouvelles réponses à découvrir et les joueurs américains sont si focalisés sur la moyenne qu’ils en oublient de chercher ces nouvelles avancées ? Ce sont des détails qui font la différence au final."

Semih : "Exactement. Faire un point n’est pas une finalité. Le faire convenablement en est une, l’effet, l’angle sont des paramètres à analyser. Je ne cherche pas à blâmer qui que ce soit mais c’est ma façon de concevoir la progression. Je veux contrôler les billes et je ne veux pas que ce contrôle m’échappe. Je peux jouer à 1,500 ou à 3,000 peu importe à partir du moment où j’ai contrôlé les éléments. Qu’il s’agisse d’un match défensif ou offensif, il faut choisir l’option au bon moment. Il est impossible d’avoir 100% de contrôle sur une partie mais c’est dans cette optique qu’il faut tendre. Comme au Snooker par exemple, la stratégie est primordiale. Si vous ne contrôlez pas les positions, c’est un carnage. Peu importe le nombre de reprises au Snooker. Au 3 Bandes, c’est exactement la même chose, la même mentalité. C’est ma philosophie de jeu."

 

Steve : "Avez-vous une préparation spécifique avant un tournoi ou une routine particulière ?"

Semih : "Entrainement un mois avant avec beaucoup de rigueur, de repositionnement en cas d’erreur. Je veux mémoriser le plus de choses possible. J’expliquais à Charles Brown et Michael Kang que la dotation était secondaire pour moi. Je veux juste prendre le maximum de plaisir et jouer beaucoup comme le permet la formule sportive du Verhoeven Open et c’est un réel enthousiasme de rencontrer tous ces joueurs panaméricains. Parfois par le passé, je n’étais pas en situation d’apprécier ces moments là mais désormais, je suis dans un tout autre état d’esprit."

 

Steve : "Nous aurons plaisir à vous voir jouer, à parler avec vous quoiqu’il en soit. Voulez-vous ajouter quelque commentaire au sujet de ce tournoi ?"

Semih : "Je serai présent, j’espère qu’il y aura du monde et j’ai hâte de voir Frédéric Caudron, Eddy Merckx, Roland Forthomme, Torbjörn Blomdahl … ce sont tous de très bons joueurs tout comme tous ceux qui participeront au Verhoeven Open. Je pense que ce sera un rendez-vous extraordinaire avec de belles rencontres et la présence médiatique de Kozoom pour assurer la retransmission des matchs à travers le monde. Je suis impatient d’y être. Le bonjour à tous les amoureux du billard aux Etats-Unis, je suis de retour aux affaires !"

 

Steve : "Bien, c’est ce que nous voulons entendre de vous. Merci Semih d’avoir pris le temps de nous répondre. Bon voyage et à bientôt parmi nous !"

Semih : "Oui je serai là du 12 au 26 pour aussi rendre visite à quelques amis. Je ne viens pas que pour jouer mais aussi pour rencontrer du monde et mes amis. Après cinq ans d’absence, il me tarde de vous voir à nouveau."

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